Les meilleurs (droits de réponse) sont les plus courts mais l’humour a ses limites
Aperçu de la jurisprudence fédérale, cantonale et internationale rendue durant l’année 2022 en matière de droit civil en lien avec les médias
Louis Wéry, MLaw, assistant et doctorant à la Chaire de droit civil I, Université de Fribourg
Jonas Dupraz, BLaw, sous-assistant à la Chaire de droit civil I, Université de Fribourg *
Die Rechtsprechung des Europäischen Gerichtshofs für Menschenrechte (EGMR) ist umfangreicher und war dieses Jahr durch französische Fälle geprägt: So beschäftigte der umstrittene Essayist Eric Zemmour den EGMR mit seinen Äusserungen gegenüber einem Angehörigen der muslimischen Gemeinschaft und testete die französische Sendung „Touche pas à mon poste“, produziert von C8, die Grenzen des Humors aus. In einem die Schweiz betreffenden Entscheid wurden die zulässigen Grenzen für die Kritik an einem Politiker diskutiert.
S’agissant de la Cour européenne des droits de l’homme, la jurisprudence, émanant principalement de France, est plus fournie : le polémiste et essayiste Eric Zemmour a occupé la CourEDH pour des propos jugés discriminatoire envers la communauté musulmane et la société C8, productrice de l’émission française « Touche pas à mon poste », a testé les limites de « l’humour » devant la CourEDH. Dans une décision concernant la Suisse, les limites admissibles pour la critique d’un politicien ont été discutées.
I. Introduction
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Les auteurs présentent et commentent deux arrêts rendus par le Tribunal fédéral, un jugement cantonal ainsi que divers arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme (CourEDH).
II. Arrêts fédéraux
1. La critique du fonctionnement d’un club de football et de son directeur sportif (TF, 5A_1050/2021 du 6 octobre 2022)
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Cette affaire s’inscrit dans le cadre d’une émission de télévision alémanique lors de laquelle B. fait diverses déclarations concernant le changement d’entraineur du club de foot Y, le FC Y, ainsi que les actionnaires de la holding détenant le FC Y., C., D. et A. En substance, lors de l’émission, B. déclare que le conseil d’administration de la holding du club est composé de membres qui n’ont aucune idée de ce qu’est le football. Ses déclarations s’en prennent en particulier à A. que B. qualifie comme une personne n’ayant que « […] wenig Ahnig […] » (« peu d’idées ») sur le sport mais « […] weiss emmer eigentlech alles e chli besser. » (« [sachant] apparemment toujours mieux »). Toujours selon B., toutes les décisions prises au sein de la holding font l’objet d’une approbation par A. « […] är tanzt eigentlech set Jahre de Verwaltigsröt of de Nase ome […] » (« [qui] depuis des années danse sur le nez du conseil d’administration »). Lorsque le modérateur de l’émission demande à B. de préciser ses propos, ce dernier donne pour exemple les discussions qui ont eu lieu lors d’un possible changement de gardien de l’équipe. À cette époque, le gardien qui était en place, ne voulant pas voir son contrat prendre fin, a directement pris contact avec A. car « […] weiss genau wo s Büro esch vom A. […] » (« [il] sait où est le bureau de A. […] ») et a réussi à faire prolonger son contrat malgré le fait que des voix se sont élevées dans le conseil d’administration du club pour un changement de gardien. B. conclut son discours en disant que : « Ond das esch eifach typisch FC Y. S’gäb no vel meh Biespel, aber das esch symptomatisch wäg de Vetterliwertschaft. » (« C’est typique du FC Y. Il ne s’agit que d’un exemple, mais c’est symptomatique du copinage qui existe au sein du FC Y. »).
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Suite à cette émission A. ouvre action en protection de sa personnalité. Il est débouté de sa demande devant les deux premières instances et forme alors un recours au Tribunal fédéral.
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L’impression et la compréhension du téléspectateur moyen sont des questions de droit que le TF revoit librement . Le TF rappelle qu’une atteinte à la personnalité peut résulter du contexte d’une présentation de faits, de l’interaction entre plusieurs informations, mais aussi d’éléments pris isolément d’un article de presse dans la mesure où, selon l’expérience générale de la vie, il faut s’attendre à ce que l’on prenne connaissance des éléments en question sans tenir compte du reste du contenu (c. 4.3.1). Dès lors, des affirmations de fait, des commentaires, des opinions ou des jugements de valeur peuvent porter atteinte à la personnalité. Par ailleurs, il importe peu qu’un fait allégué reflète la vérité de manière exacte ou fausse, incomplète ou inexacte, ou encore que la critique exprimée soit fondée ou non. La manière de s’exprimer n’a non plus d’importance. En effet, il peut s’agir de gestes, de paroles prononcées ou écrites ou encore de dessins. Ce qui importe est qu’aux yeux d’un observateur moyen, la personne concernée soit perçue comme étant méprisable.
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Pour ce qui est du critère de l’intensité de l’atteinte, selon la jurisprudence du TF, le comportement analysé doit atteindre une certaine intensité, de sorte qu’il y ait une véritable « intrusion ». Une diminution de la réputation peut, dans certaines circonstances, déjà se produire lorsqu’une personne se fait reprocher d’avoir commis un acte socialement désapprouvé ou douteux au regard de l’État de droit. La véracité des faits allégués ou des critiques formulées ne joue un rôle que lorsqu’il s’agit de déterminer si la violation est autorisée ou non.
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Un jugement de valeur est considéré comme contraire à l’honneur lorsqu’il dépasse le cadre du supportable ou quand il se réfère à un fait inexistant ou faux. Le jugement de valeur mixte est attentatoire à l’honneur s’il est inutilement blessant par sa forme ou repose sur des faits qui sont faux. La publication d’un jugement de valeur ou d’un jugement de valeur mixte relève de la liberté d’expression, raison pour laquelle une certaine retenue est de mise lorsque les tribunaux déterminent s’ils sont attentatoires à l’honneur.
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Dans cette affaire, le TF considère qu’il convient de suivre le recourant dans la mesure où l’impression générale de l’émission est plus déterminante que les déclarations prises individuellement. En effet, selon le TF, il convient de retenir l’impression générale à plus forte raison, car il ne s’agit pas en l’espèce d’un écrit mais d’une émission télévisuelle pour laquelle, au regard de l’expérience générale de la vie, il ne faut pas s’attendre à ce que des éléments de cette émission soient pris en compte indépendamment des autres contenus de l’émission.
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Cependant, selon le TF, l’impression générale laissée par l’émission ne porte pas atteinte à la personnalité de A, car les critiques émises par B. concernent la structure organisationnelle du club de manière générale. Selon le TF, la critique émise par B. vise avant tout à mettre en exergue le fait que A. joue un rôle déterminant au sein du conseil d’administration et que son avis est tant suivi que les autres membres du conseil d’administration protègent ce procédé ou s’en remettent au recourant pour la prise de décisions sportives. Le TF réfute alors l’interprétation faite par A. des propos de B. qui considère, pour sa part, que les allégations litigieuses tendent à indiquer qu’il ne prend pas en compte les décisions prises par le club et n’agit pas dans l’intérêt du FC Y., mais poursuit en quelque sorte ses propres intérêts.
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En conclusion, la réputation du recourant, respectivement son honneur professionnel en tant qu’administrateur, n’apparaît pas comme étant diminuée au regard de la protection conférée par l’art. 28 CC. Le recours est par conséquent rejeté.
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Commentaire : A travers cette décision, le TF rappelle, conformément à sa jurisprudence, qu’en matière d’atteinte à la personnalité par voie de presse une impression générale laissée par un reportage peut à elle seule constituer une atteinte à la personnalité.
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Le TF retient l’impression générale du reportage plutôt que les allégations de l’intimé prises isolément car « au regard de l’expérience générale de la vie, il ne faut pas s’attendre à ce que des éléments de cette émission soient pris en compte indépendamment des autres contenus de l’émission. ». Le doute est permis quant à cette considération. En effet, « l’expérience générale de la vie » tend aujourd’hui plutôt à ce que des extraits d’émissions télévisuelles soient dissociés du reste du contenu de l’émission. Des applications telles que Tiktok (1,6 milliards d’utilisateurs échangeant des vidéos de trois minutes au maximum) ou Youtube shorts (1,5 milliards d’utilisateurs échangeant des vidéos de soixante secondes au maximum) le prouvent à l’envie. Il arrive ainsi fréquemment que des allégations sorties de leur contexte tenues lors d’émissions télévisuelles soient diffusées à travers ces applications ce qui tendrait ainsi à considérer, au contraire, qu’il faille s’attendre à ce que des éléments d’une émission télévisuelle soient pris en compte indépendamment du reste de l’émission. En l’espèce, il serait donc possible que des extraits de l’émission litigieuse soient diffusés sur de telles plateformes.
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Enfin, sur l’absence d’atteinte à l’honneur, le Tribunal fédéral considère que les critiques émises par B. concernent le fonctionnement du club de foot dans lequel A. dispose en quelque sorte d’un blanc-seing en ce qui concerne les décisions sportives. La seule fois où B. vise directement A., c’est quand le premier dit du second qu’il « ne connaît rien au sport ». Pour le TF, cette allégation ne peut être considérée comme une atteinte à la personnalité car elle n’atteint pas l’intensité nécessaire pour être considérée comme telle.
2. La modification judiciaire d’un droit de réponse (TF, 5A_559/2021 du 7 juin 2022)
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Les sociétés A. SA (recourante) et B. SA (intimée) sont toutes deux actives dans le domaine des médias. Les deux entreprises ont chacune publié un reportage faisant état de plusieurs défauts et incidents intervenus au sein d’un service d’un hôpital. B. SA a, en complément de son reportage, publié une interview du professeur H., alors éditeur d’une revue spécialisée.
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À l’occasion de cette interview, le professeur H. remet en question le professionnalisme des journalistes de A. SA. Il leur reproche de ne pas avoir publié une liste de conflits d’intérêts en même temps que leur reportage sur l’ancien directeur du service de l’hôpital en question. On précisera au demeurant que l’ancien directeur de service contribuait à la revue spécialisée du professeur H. Ce dernier conclut l’interview en affirmant que la rédaction de A SA. « n’a rapporté que ce qui confirmait sa thèse », ce qui était « du mauvais journalisme ».
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A. SA demande au tribunal de commerce du canton de Zurich la publication d’un droit de réponse dans le journal de B. SA. Le Tribunal rejette la demande au motif que les déclarations du professeur H. ne peuvent être comprises comme des allégations de fait, mais comme des jugements de valeur et opinions personnelles ne permettant pas de droit de réponse. A. SA recourt au Tribunal fédéral en réitérant sa demande et, subsidiairement, en demandant que le texte du droit de réponse soit publié dans une version raccourcie, selon l’appréciation du tribunal, dans l’hypothèse où le droit de réponse devait ne pas respecter les exigences de formes et de contenu (cf. art. 28h CC).
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Le Tribunal fédéral ne tranche pas la question de savoir si les déclarations du professeur doivent être considérées comme une allégation de fait ou comme un jugement de valeur, le recours étant selon lui mal fondé même si l’on admet une déclaration de fait. En effet, le texte du droit de réponse doit se limiter, sous une forme concise, à l’objet de la publication contestée afin de satisfaire aux exigences légales de l’art. 28h al. 1 CC. Or, le texte du droit de réponse de la recourante va bien au-delà de la simple contestation de la date à laquelle la liste lui est parvenue et de la raison pour laquelle elle ne l’a pas publiée.
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À ce titre, le Tribunal fédéral rappelle que, dans la mesure où le texte d’un droit de réponse ne satisfait pas aux exigences légales, le tribunal est tenu de l’adapter sans modification du contenu ou remaniement rédactionnel proprement dit. Le tribunal peut cependant refuser d’adapter une réponse, notamment lorsqu’il doit la reformuler lui-même. Il n’est toutefois pas possible de définir de manière générale et abstraite où se situe la limite entre un droit de réponse totalement inadmissible et donc non susceptible d’être réduit et un droit de réponse partiellement inadmissible et susceptible d’être raccourci. Ainsi, la jurisprudence admet de simples coupes de texte, ou l’ajout d’une date, mais ne permet pas une reformulation ou un remaniement du texte allant au-delà de l’affirmation initiale.
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En l’espèce, le TF considère qu’il n’est pas possible, concernant le droit de réponse proposé par A. SA, de simplement supprimer certaines parties du texte afin de satisfaire aux exigences légales. Afin que le droit de réponse de B. SA y satisfasse, le Tribunal fédéral devrait rechercher, dans le texte, les informations pertinentes et les reformuler lui-même, ce qui dépasserait manifestement le cadre de ce qu’un tribunal est en droit de faire.
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Le Tribunal fédéral fait en outre remarquer, qu’en tant qu’entreprise de médias, la recourante devait savoir que son texte de réponse n’était pas admissible, de sorte que sa demande pourrait constituer un abus de droit (art. 28h al. 2 CC). La question est toutefois laissée en suspens faute de constatation en ce sens à l’échelon cantonal.
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Commentaire : Le présent arrêt a le mérite de rappeler la jurisprudence actuelle sur la question de la modification judiciaire du texte d’un droit de réponse. De plus, il met en exergue l’importance de la rédaction proprement dite du texte de réponse ; sa formulation, la présence d’informations accessoires ou encore simplement sa présentation peuvent empêcher toute modification du texte par le tribunal et conduire au rejet de la demande, alors que le droit de réponse était en soi possible.
III. Arrêts cantonaux
3. Précision de la définition de personnalité publique (TC/VD AX22.038444-230011 86 du 24 février 2023)
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J. travaille dans le monde de la finance et possède une fortune considérable. Suite au prononcé d’une ordonnance pénale pour violation d’une obligation d’entretien dirigée contre lui, l’Administration fédérale des contributions (ci-après ; AFC) ouvre à son encontre des procédures pénale et administrative pour des soupçons de graves infractions fiscales. En outre, plus de 33 millions de francs appartenant au financier ont été séquestrés.
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Suite à un article de deux journalistes du quotidien C., J. adresse une requête de mesures provisionnelles ordonnant aux journalistes de retirer l’article du site internet du quotidien. J. est débouté de ses conclusions en raison de sa qualité de « personne de l’actualité contemporaine relativement connue », dès lors qu’il a fait l’objet de trois articles de presse en Suisse et en Angleterre. Dans ces circonstances et eu égard à l’importance du requérant sur la place financière suisse, informer le public sur la procédure le concernant relevait de l’intérêt public.
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J. forme appel contre l’ordonnance de mesures provisionnelles en invoquant une violation des art. 28 CC et 261 al. 1 CPC. Selon l’appelant, l’apparition récente de son nom dans des quotidiens britanniques et suisse ne saurait faire de lui une personnalité publique. De plus, J. considère que les articles de presse en question ne sont pas directement centrés sur lui, mais sur un tiers. La description détaillée des procédures pénale et administrative entrant dans son domaine privé, l’intérêt public à la divulgation de ces informations devrait ainsi céder le pas sur son intérêt privé à la protection de sa personnalité.
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La Cour d’appel civile rappelle les conditions de l’art. 28 CC lors d’atteinte à la personnalité par une entreprise de médias (c. 5.1.2) et la notion de « personnalités publiques » selon laquelle celles-ci doivent tolérer des atteintes plus importantes à leur personnalité que des particuliers (c. 5.1.3).
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En l’espèce, le tribunal nie la qualité de personnalité publique de l’intéressé. Selon le tribunal, pour retenir une telle qualité « il est en effet implicite que cette personne a – ou a eu – une certaine activité qui a nécessairement eu pour effet de la mettre sur le devant de la scène », tels des dirigeants politiques, des célébrités sportives, des artistes, ou encore des personnes ayant réalisé un exploit. Or, ce n’est pas le cas de J. qui n’est apparu que dans trois articles de presse dont un seul en Suisse. Soutenir l’inverse peine à convaincre car cela reviendrait à dire que le premier, voire les deux premiers articles touchant à la sphère privée d’un individu seraient, selon leur contenu, illicites alors que les suivants ne le seraient plus parce que la personne aurait entre-temps acquis le statut de personnalité publique. L’appel formé par J. est par conséquent admis.
4. L’affaire Spiess-Heggelin (Tribunal cantonal de Zoug, arrêt du 22 juin 2022, A1 2020 56)
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Au titre des arrêts cantonaux parus en 2022, nous relevons encore la décision rendue dans l’affaire Spiess-Heggelin portant sur le calcul de la remise du gain en protection de la personnalité. Dans cette décision, la société Ringier SA, propriétaire du journal Blick, a été condamnée à remettre à la demanderesse, Madame Spiess-Heggelin, les informations nécessaires au calcul du bénéfice réalisé suite à la publication de quatre articles de presse portant atteinte à la personnalité de cette dernière. La décision est résumée ainsi que commentée par Louis Wéry dans la revue de jurisprudence de l’année passée (Julien Francey/Louis Wéry, Quand l’acharnement médiatique entraine la remise du gain, medialex 08/2022).
IV. Arrêts de la CEDH
5. Les propos discriminatoires d’un polémiste (Affaire Zemmour c. France, requête n° 63539/19)
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Le présent arrêt de la CourEDH (ci-après ; la Cour) fait suite aux propos controversés tenus par l’essayiste et politicien Éric Zemmour lors d’une émission télévisée. Les propos ont été jugés, au regard de la législation française, comme une provocation à la discrimination, à la haine et à la violence envers un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur religion.
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M. Zemmour conteste sa condamnation devant la Cour en se prévalant de l’art. 10 § 1 CEDH. La Cour établit d’abord que la condamnation pénale de M. Zemmour constitue une ingérence dans son droit à la liberté d’expression. La Cour rappelle ensuite que cette ingérence peut être justifiée si elle est prévue par la loi, poursuit un but légitime et est nécessaire dans une société démocratique (art. 10 § 2 CEDH).
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S’agissant de la condition de la légalité et de la condition de la poursuite d’un but légitime, la Cour considère que ces dernières sont remplies (§ 45). Reste ainsi à examiner si l’atteinte était « nécessaire dans une société démocratique » et c’est sur ce dernier point que ce concentre l’analyse de la Cour (§ 47 ss).
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M. Zemmour a qualifié les musulmans en France de « colonisateurs » et « d’envahisseurs » islamisant le pays, les incitant à choisir entre « l’islam et la France ». La Cour, à l’instar des juridictions nationales, interprète ces propos comme une incitation au rejet et à l’exclusion de la communauté musulmane, de sorte qu’ils ont été retenu comme étant discriminatoires et non pas simplement comme critiques envers l’Islam. Lors de la pesée des intérêts concurrents, la Cour prend en compte le fait que M. Zemmour est un journaliste et polémiste expérimenté, ce qui aurait dû l’amener à faire preuve de retenue.
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La Cour conclut que les motifs retenus par les juridictions nationales justifiaient cette ingérence et que l’amende infligée était proportionnée à l’objectif poursuivi et considère que cette mesure était nécessaire pour préserver les droits d’autrui. Par conséquent, la Cour en conclut qu’il n’y a pas eu violation de l’article 10 de la Convention.
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Commentaire : La Cour équilibre la liberté d’expression avec la protection contre la discrimination et la haine, en prenant en compte le contexte, la nature des propos et l’impact médiatique, aboutissant à une décision justifiée dans une société démocratique.
6. Des propos discriminatoires sous couvert d’humour (Affaire C8 c. France, requêtes n° 58951/18 et n° 1308/19)
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« Touche pas à mon poste » est une émission de divertissement diffusée sur la chaîne C8, animée par C.H. et consacrée à l’actualité télévisuelle. En raison de nombreuses polémiques et plaintes des téléspectateurs, la société C8, propriétaire de la chaîne du même nom, a été mise en demeure par le Conseil supérieure de l’audiovisuel (ci-après ; CSA), à de nombreuses reprises, de respecter la législation française. Suite à deux séquences de l’émission intervenues après les mises en demeure, le CSA a sanctionné C8 en suspendant la diffusion de publicités pendant deux semaines avant et après l’émission et lui a infligé une amende.
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Les deux décisions du CSA ont été portées devant le Conseil d’État qui les a confirmées.
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Invoquant l’art. 10 CEDH, la société C8 porte les décisions du Conseil d’État devant la Cour européenne des droits de l’homme qui joint les deux procédures.
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La Cour reconnaît que les sanctions du CSA à l’encontre de la société C8 constituent des ingérences dans le droit à la liberté d’expression, protégé par l’art. 10 § 1 CEDH. Pour être conformes à la Convention, de telles ingérences doivent être prévues par la loi, poursuivre un but légitime au regard de l’article 10, et être nécessaires dans une société démocratique.
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La Cour conclut que les sanctions sont prévues par la loi et visent légitimement à protéger les droits d’autrui, notamment car les séquences litigieuses sont attentatoires à l’image des femmes, préjudiciables à des groupes en raison de leur orientation sexuelle, ainsi que portant atteinte à la vie privée, à l’image, à l’honneur ou à la réputation.
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Concernant la nécessité de telles ingérences dans une société démocratique, la Cour souligne que l’expression sur des sujets d’intérêt général bénéficie d’une protection élevée, limitant la marge d’appréciation des États. Cependant, lorsque l’expression ne contribue pas au débat d’intérêt général, la marge d’appréciation des États est plus large.
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À ce propos, dans cette affaire, la Cour estime que les séquences litigieuses n’avaient pas de caractère informatif ou idéologique. Elles étaient plutôt conçues comme du divertissement commercial visant à attirer un large public par le biais de mises en scène délibérément provocatrices, sans lien avec des sujets d’intérêt général. Par conséquent, l’État avait une marge d’appréciation étendue pour sanctionner la société C8 en raison du contenu de ces séquences.
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Bien que la société C8 ait soutenu que les séquences étaient humoristiques, la Cour rappelle que la liberté d’expression, y compris l’humour, est sujette aux limites énoncées à l’art. 10 § 2 de la Convention. Le droit à l’humour n’autorise pas tout et les personnes qui invoquent la liberté d’expression doivent assumer des devoirs et des responsabilités.
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Pour ce qui est de la sévérité des sanctions, la Cour rappelle que pour apprécier la lourdeur de sanctions prononcées il convient de les mettre en rapport avec le chiffre d’affaires de la société C8. Ainsi et malgré l’indéniable sévérité des sanctions prononcées, celles-ci représentent moins de 10% du chiffre d’affaires et ne mettent pas en péril la société C8, au demeurant toujours en activité. Les sanctions n’ont en outre pas eu pour conséquence la déprogrammation de l’émission « Touche pas à mon poste ». Partant, ces sanctions ne sont pas disproportionnées aux yeux de la Cour qui confirme les décisions précédentes en considérant qu’il n’y a pas eu de violation de l’art. 10 de la Convention.
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Commentaire : Cette décision rappelle la marge d’appréciation dont bénéficie les Etats lorsqu’il s’agit de s’interroger sur une restriction de la liberté d’expression. Lorsque l’expression est usée dans le but de contribuer ou participer à un débat d’intérêt général, la marge d’appréciation dont disposent les Etats pour restreindre la liberté d’expression est réduite. Au contraire, la marge d’appréciation est plus ample dès lors qu’il s’agit d’un discours commercial et publicitaire. En l’occurrence, la Cour considère que l’émission « Touche pas à mon poste » est une émission de pur divertissement qui n’a pas d’autre ambition que d’attirer, dans un but commercial, le public le plus large possible y compris au moyen de mises en scènes délibérément provocatrices, voire choquantes. Rien de ce qui est exprimé dans cette émission ne se rattache d’une quelconque manière à un sujet d’intérêt général. Partant, la marge d’appréciation des juridictions françaises pour restreindre la liberté d’expression était grande et elles n’ont, par conséquent, pas outrepassé cette dernière en sanctionnant l’émission pour ses multiples « dérapages ».
7. Confirmation et consolidation des conditions de protection des lanceurs d’alerte (Affaire Halet c. Luxembourg, requête n° 21884/18)
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La présente affaire concerne la divulgation aux médias par un lanceur d’alerte, employé d’une société luxembourgeoise d’audit, de déclarations fiscales et d’autres documents confidentiels de multinationales protégés par le secret professionnel. Les faits s’inscrivent dans l’affaire dite des « Luxleaks » lors de laquelle un premier lanceur d’alerte, employé de la même société d’audit, avait déjà, une année auparavant, divulgué quelques 45’000 pages de documents confidentiels. Selon les différentes instances nationales, les documents ainsi transmis par les deux lanceurs d’alerte ont permis d’informer le public sur le fonctionnement des accords fiscaux que concluait la société d’audit, pour le compte d’entreprises multinationales, avec les autorités fiscales luxembourgeoises. Bien que légale selon le droit luxembourgeois, cette pratique peut être perçue comme éthiquement douteuse, dès lors que, par des mécanismes de transfert de fonds entre sociétés d’un même groupe, des entreprises multinationales ont pu économiser des sommes considérables en étant imposées au Luxembourg.
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Alors que le premier lanceur d’alerte s’est vu acquitté de l’ensemble des charges pesant sur lui, le second fut condamné en dernière instance nationale (ci-après ; la Cour d’appel) pour violation du secret professionnel. La Cour d’appel a considéré que les documents transmis par le requérant ne fournissaient aucune information cardinale jusqu’alors inconnue étant susceptible de relancer ou nourrir le débat sur l’évasion fiscale. Le requérant interjette recours auprès de la Cour pour violation de l’art. 10 CEDH.
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La Cour rappelle en premier lieu que l’art. 10 de la Convention s’étend à la sphère professionnelle en générale, soit aux relations entre employé et employeur obéissant au droit public, mais également à celles ressortissant au droit privé (§ 111).
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La Cour contrôle ensuite si le requérant peut être mis au bénéfice du fait justificatif du lanceur d’alerte à la lumière de sa jurisprudence (Guja c. Moldova [GC], n° 14277/04, §§ 74-95, CEDH 2008).
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Six critères (qui ont tous le même poids dans l’appréciation de la Cour) permettent de déterminer s’il existe un fait justificatif, à savoir l’existence ou non d’autres moyens pour procéder à la divulgation, l’intérêt public présenté par les informations divulguées, l’authenticité de ces informations, le préjudice causé à l’employeur, la bonne foi du lanceur d’alerte et, enfin, la sévérité de la sanction. Parmi ces critères, la Cour examine en particulier le préjudice causé à l’employeur et sa mise en balance avec l’intérêt public à la divulgation.
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S’agissant du premier critère litigieux, la Cour retient, contrairement à la Cour d’appel, que les divulgations présentaient bien un intérêt public d’information sur les pratiques fiscales luxembourgeoises. Le fait pour le requérant d’avoir divulgué ces informations alors que le débat était déjà ouvert depuis une année grâce au premier lanceur d’alerte est sans importance. Plusieurs alertes sur un même sujet peuvent en effet s’avérer nécessaires pour que les autorités compétentes se mobilisent (§ 180 ss).
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Cela étant, la Cour estime nécessaire de rechercher si d’autres intérêts ont été atteints par les divulgations du requérant. La Cour retient ainsi une atteinte aux intérêts privés et à la réputation des sociétés multinationales dont les noms ont été révélés par le requérant. La Cour admet en outre une atteinte à l’intérêt public sur deux points. D’une part, avant de pouvoir divulguer les documents litigieux, le requérant a dû les soustraire à son employeur, de sorte qu’il convient de prendre en compte l’intérêt public à prévenir et sanctionner le vol. D’autre part, la Cour souligne que le requérant n’était pas simplement tenu à un devoir de loyauté et de discrétion envers son employeur, mais qu’il était également soumis, de par la loi, au respect du secret professionnel en tant que réviseur. Le respect du secret professionnel présente incontestablement un intérêt public en assurant la crédibilité des professions qui y sont soumises (§ 193 ss).
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Au vu des considérations qui précèdent, la Cour conclut que les documents divulgués visent néanmoins un intérêt public indéniable qui doit l’emporter sur l’ensemble des effets dommageables en raison de l’importance du débat public sur les pratiques fiscales des multinationales (§ 201 ss).
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Commentaire : À travers cet arrêt, la Cour a non seulement confirmé les « critères Guja » devant être réunis afin de bénéficier de la protection accrue des lanceurs d’alerte sur le fondement de l’art. 10 de la Convention, mais a également profité des spécificités du cas d’espèce pour les affiner. C’est le cas de la mise en balance des intérêts concurrents qui, jusqu’à présent, ne s’opérait qu’entre l’intérêt public à la divulgation et l’intérêt de l’employeur à en garder le secret. À présent, il convient d’apprécier non seulement l’intérêt de l’employeur, mais également tout autre effet dommageable résultant de la divulgation (§ 120 et 131-148) ; comme l’intérêt public à la prévention et à la répression des infractions ou celui du respect du secret professionnel (§ 193 ss).
8. Le droit à l’oubli face aux archives d’un quotidien belge (Affaire Hurbain c. Belgique, requête n° 57292/16)
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Le requérant, éditeur du journal Le Soir, a publié un article en 1994 relatant un accident de voiture causé par G., un médecin, sous l’influence de l’alcool, entraînant la mort de deux personnes. G. a été condamné en 2000, puis réhabilité en 2006. En 2008, le journal a mis en ligne ses archives, y compris cet article. G. a demandé à la société propriétaire du journal de supprimer ou d’anonymiser l’article en 2010, craignant des conséquences professionnelles et personnelles. La même demande a été adressée à Google.
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En première instance, le tribunal a ordonné l’anonymisation de l’article en ligne. En appel, cette décision est confirmée par le tribunal qui considère que G. bénéfice d’un droit à l’oubli numérique et que l’anonymisation de l’article est la manière la plus efficace de préserver la vie privée de G. sans pour autant porter atteinte de manière disproportionnée à la liberté d’expression du requérant.
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La Cour de cassation rejette le pourvoi du requérant en affirmant que la Cour d’appel a fondé le « droit à l’oubli » sur des bases légales solides, notamment l’art. 8 CEDH. Selon la dernière instance nationale, le droit à l’oubli numérique est une composante intrinsèque du droit au respect de la vie privée qui peut justifier une ingérence dans le droit à la liberté d’expression. Estimant que sa liberté d’expression au regard de l’art. 10 CEDH est violé, le requérant dépose un recours auprès de la CourEDH (ci-après : la Cour).
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La Cour considère en premier lieu qu’il y a effectivement une ingérence dans la liberté d’expression du requérant dès lors qu’il lui est demandé d’anonymiser l’article de presse relatant le passé judiciaire de G.
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Sur la nécessité de cette ingérence dans une société démocratique la Cour relève d’une part qu’à l’heure actuelle les archives d’articles de presse sur internet constituent une source précieuse permettant entre autres l’enseignement, les recherches historiques et la formation de l’opinion démocratique et doivent de ce fait être protégées par l’art. 10 CEDH. D’autre part, le droit à l’oubli émanant de l’art. 8 CEDH confère une protection de la réputation d’une personne évitant ainsi que la perception de celle-ci dans l’opinion publique soit indéfiniment négative.
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Afin de mettre en balance ces deux sphères de protection émanant des articles 8 et 10 CEDH, la Cour examine les critères sur lesquels la Cour d’appel s’est fondée pour ordonner l’anonymisation (la divulgation initiale licite des faits, la nature judiciaire des faits, l’absence d’intérêt contemporain à la divulgation, le temps écoulé depuis les faits et l’intérêt contemporain à l’information). Elle conclut que lesdits critères étaient appropriés et ont été correctement évalués afin de déterminer si, en l’espèce le droit à l’oubli numérique de G. devait l’emporter sur la liberté d’expression du requérant, sachant que la mesure d’anonymisation était la moins restrictive.
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En définitive, la Cour conclut que la mesure d’anonymisation n’a pas eu d’impact disproportionné sur la liberté d’expression du requérant et que les tribunaux ont correctement équilibré les droits en jeu dans cette affaire. Sur la base de ces considérations, elle rejette le recours.
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Commentaire : A travers cette décision, la CourEDH trace une fois de plus les contours du droit à l’oubli numérique. Les critères repris de la Cour d’appel dans la décision doivent permettre à un tribunal d’estimer dans quelle mesure le droit à l’oubli peut être considéré comme acquis par une personne qui prétend en bénéficier.
9. La prévisibilité d’une loi qui sanctionne des propos constitutifs de provocation à la haine (Affaire Sanchez c. France requête n° 45581/15)
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Le requérant, maire de Beaucaire et membre du Rassemblement national, a été condamné pour provocation à la haine ou à la violence à l’égard d’un groupe de personnes, notamment en raison de leur origine suite à une publication sur Facebook dans laquelle il associait la communauté musulmane aux activités illégales et à l’insécurité de la ville de Nîmes et visait en particulier une personne de cette communauté. La Cour de cassation a rejeté le pourvoir du requérant en se référant à l’article 10 CEDH, considérant que le délit en question entre dans les restrictions permises par cet article en matière de liberté d’expression (art. 10 § 2 CEDH). Contre ce jugement, le requérant forme recours auprès de la CourEDH.
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La Cour rappelle en premier lieu qu’une ingérence à l’art. 10 CEDH est possible si elle est prévue par la loi, poursuit un but légitime ainsi que nécessaire dans une société démocratique.
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Le requérant considère que la législation française sur base de laquelle il a été condamné ne peut s’appliquer dans le contexte d’une publication sur Facebook.
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En ce qui concerne l’exigence de prévisibilité de la loi, la Cour souligne que celle-ci doit être formulée de manière suffisamment claire pour permettre aux individus de comprendre ses implications et de régler leur conduite en conséquence. Une certaine marge d’interprétation n’est pas nécessairement problématique, tant que les tribunaux peuvent dissiper les doutes quant à son application.
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De plus, le caractère inédit d’une question juridique ne constitue pas nécessairement une violation de l’accessibilité et de la prévisibilité de la loi, tant que la solution retenue est raisonnablement prévisible.
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Par ailleurs, le pouvoir de contrôle du respect du droit interne de la Cour est limité. En effet, sa tâche consiste principalement à déterminer si les effets d’une ingérence sont compatibles avec la Convention, sous réserve d’interprétation arbitraire ou manifestement déraisonnable par les autorités nationales.
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Par la suite, la Cour note que la condamnation du requérant se fonde sur des articles spécifiques de la loi française. Elle rappelle que ceux-ci sont conformes à l’exigence de prévisibilité de la loi en vertu de l’article 10 de la Convention, comme cela a été précédemment établi par la jurisprudence. Ainsi, l’interprétation de cet article par les juridictions françaises, ainsi que son application dans le cas d’espèce, n’ont pas été arbitraires ni manifestement déraisonnables. De plus, le fait que la question de la responsabilité du titulaire d’un compte Facebook pour les propos diffusés sur son mur n’était pas encore clarifiée dans la jurisprudence au moment des faits n’entraîne pas nécessairement une violation de l’exigence de prévisibilité de la loi.
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En conclusion, la Cour estime que la loi française était suffisamment précise pour permettre au requérant d’adapter son comportement en conséquence. Partant, l’art. 10 de la Convention n’a pas été violé.
10. Un politicien accusé d’être un tortionnaire d’animaux (Affaire Verein gegen Tierfabriken Schweiz et Kessler c. Suisse (VgT) requête n° 21974/16)
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À l’approche d’une élection pour le Conseil d’État fribourgeois, une association de protection des animaux (Verein gegen Tierfabriken (VgT)) et son président (M. Kessler) éditent deux brochures dans lesquelles ils critiquent un politicien, candidat à sa réélection et en charge du département de l’agriculture dans le canton, en le désignant notamment comme responsable de « fabriques concentrationnaires d’animaux » ayant une « absence de compassion envers des êtres sensibles sans défense », menteur et hypocrite.
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Le politicien porte l’affaire devant les tribunaux suisses qui constatent une atteinte à sa personnalité. En substance, les instances nationales retiennent que même si les brochures peuvent répondre à un intérêt public (informer le public sur les méthodes d’élevage de porcs que l’homme politique a autorisé lors de sa législature), ledit intérêt ne justifie pas l’intégralité des propos visant le politicien.
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Estimant leurs libertés d’expression violées, l’association et son président portent l’affaire devant la CourEDH.
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La Cour relève en premier que les propos incriminés sont des assertions sur des questions d’intérêt public et constituent à ce titre des jugements de valeur. De plus, ces propos visent un homme politique pour qui les limites de la critique admissibles sont plus larges que pour les simples particuliers. Ainsi, la Cour considère que ces expressions restent dans les limites de l’admissible dans le contexte d’une élection et du sujet d’intérêt général de la protection des animaux. Par ailleurs, les juridictions nationales n’ont pas examiné les éléments produits par l’association et son président pour étayer leurs propos. De ce fait, lesdites juridictions n’ont, selon la Cour, pas établi de façon convaincante la nécessité de placer le droit du politicien à la protection de sa réputation au-dessus du droit de l’association et son président à la liberté d’expression. Partant, il y a eu violation de l’art. 10 CEDH.
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Commentaire : La Cour considère les propos comme des jugements de valeur alors qu’en réalité il s’agit aussi d’affirmations de fait, comme par exemple une accusation selon laquelle le politicien aurait levé l’interdiction de détenir des animaux prononcée à l’encontre d’un tortionnaire d’animaux. Il s’agit d’affirmations factuelles aisément accessibles à la preuve et constituent, si elles sont fausses, une atteinte illicite à la réputation du politicien. De plus, la CourEDH reproche aux instances suisses de n’avoir pas examiné certains éléments présentés par l’association et son président sans prendre en considération le fait que lesdits éléments de preuve ont été présentés tardivement et ne pouvaient de plus pas être pris en compte comme des faits notoirement connus. Ainsi, lesdites preuves n’ont pas été administrées parce qu’elles ne pouvaient plus l’être en vertu de la procédure civile suisse.
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Pour une critique complète de la décision : Christoph Born, Ein Politiker muss sich mehr gefallen lassen als eine einfach Privatperson, medialex 01/23, 8. Febr. 2023.
* Les auteurs tiennent à remercier la Prof. Dr. Christiana Fountoulakis, titulaire de la Chaire de droit civil I à l’Université de Fribourg, pour ses précieuses relectures de la présente contribution.
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