L’année des procès infructueux de la protection de la personnalité

L

Aperçu de la jurisprudence fédérale, cantonale et internationale rendue durant l’année 2020 en matière de droit civil et de procédure civile en lien avec les médias

Christiana Fountoulakis, professeure ordinaire, Chaire de droit civil I, Université de Fribourg
Julien Francey, avocat, docteur en droit

Zusammenfassung: Im vergangenen Jahr wurden von den Schweizer Gerichten relativ viele persönlichkeitsrechtliche Klagen gegen Medien beurteilt, wobei die wenigsten erfolgreich waren. Das Bundesgericht hatte sich unter anderem mit antisemitischen Vorwürfen, unlauterer Herabsetzung durch Konsumentenschutzsendungen sowie mit neuen Rechtsvorbringen bei vorsorglichen Massnahmen zu befassen. Aus der Romandie sind zwei kantonale Entscheidungen erwähnenswert, die einen auf Wirtschaftskriminalität spezialisierten Newsletter betreffen, welcher Vorwürfe gegen einen Trader resp. einen Geschäftsmann erhebt. Kantonsgerichtliche Urteile aus der Deutschschweiz befassen sich mit einer gegen eine KESB und deren Präsidenten geführten Medienkampagne sowie, einmal mehr, mit der «Spiess-Hegglin»-Affäre. Weitere kantonale Urteile betreffen u.a. den Zugang der Presse zu Gerichtsakten sowie das Gegendarstellungsrecht.

Résumé: Les tribunaux suisses ont jugé un nombre relativement important d’actions en protection de la personnalité contre les médias en 2020, même si très peu d’entre elles ont abouti. Le Tribunal fédéral a notamment traité de cas impliquant des accusations antisémites, des reproches de dénigrement déloyal lors d’émissions de protection des consommateurs et de la question de l’admissibilité de nouveaux arguments juridiques en matière de mesures provisionnelles. Deux arrêts cantonaux de Suisse romande concernent une newsletter spécialisée dans la criminalité en col blanc, qui porte des accusations contre un trader et contre un homme d’affaires. Des arrêts des tribunaux cantonaux alémaniques portent sur une campagne médiatique menée contre une autorité de protection de l’enfant et de l’adulte ainsi que son président et, à nouveau, sur l’«affaire Spiess-Hegglin». D’autres arrêts concernent notamment l’accès aux dossiers judiciaires par des journalistes et le droit de réponse.

I. Introduction

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La chronique présente et discute quatre arrêts du Tribunal fédéral ainsi que quatre arrêts cantonaux. Cinq autres arrêts cantonaux seront présentés sous forme de résumé succinct. Pour finir, nous indiquerons quelques arrêts de la Cour de justice européenne rendus en matière de protection des données personnelles.

II. Arrêts fédéraux

1. Le recours contre des mesures provisionnelles devant le Tribunal fédéral ne peut introduire de nouveaux faits, griefs juridiques ou de nouvelles preuves sauf s’ils résultent de la décision de l’instance précédente (Tribunal fédéral, arrêt 5A_742/2019 du 7 juillet 2020)

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La B. SA, une société active dans le commerce spécialisé d’animaux de compagnie, est critiquée à travers un article de «A.news», un quotidien d’un tirage de 420’000 exemplaires appartenant à l’association A.

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L’article en question traite de la détention des lapins et explique que les animaux ont besoin d’un espace suffisant pour une détention adaptée à l’espèce, que B. SA propose à la vente des «jouets» et des «friandises» inutiles pour les lapins et que les lapins ne sont pas des jouets adaptés aux enfants. Notamment, la contribution se termine par la phrase suivante : «Le logo de B. SA, <de l’amour au (……)>, devrait plutôt être <de l’amour au profit>.» À côté du texte se trouve le logo de B. SA, dont l’ajout <de l’amour au (……)> est barré en rouge.

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À titre de mesures provisionnelles, B. SA demande que l’ensemble de la publication, qui se trouve encore en ligne ainsi que sur Facebook, soit supprimé. Le Tribunal de commerce zurichois admet la demande notamment sur le point du détournement du logo mais refuse d’ordonner le retrait complet de l’article sur Internet.

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Avec un mémoire de 63 pages – le jugement du Handelsgericht n’en comptait pas plus de huit – l’association A. recourt au Tribunal fédéral. C’est l’occasion pour ce dernier de rappeler les principes régissant le recours contre des mesures provisionnelles: elles ne peuvent être attaquées que pour violation de droits constitutionnels (art. 98 LTF), ce qui n’est examiné par le TF que dans la mesure où un tel grief a été soulevé et motivé (art. 106 al. 2 LTF). Les griefs doivent être formulés de manière claire et détaillée; le Tribunal fédéral n’examine pas les griefs insuffisamment motivés. Si le grief d’arbitraire (art. 9 Cst.) est soulevé, comme c’est le cas en l’espèce, il faut expliquer dans quelle mesure l’arrêt attaqué est manifestement insoutenable, non seulement dans son raisonnement, mais aussi dans son résultat.

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Le Tribunal fédéral rappelle en outre l’art. 99 LTF: de nouvelles conclusions, de nouveaus faits ainsi que de nouvelles preuves ne son pas admissibles sauf s’ils résultent de la décision de l’instance précédente. Dans la même ligne, et fondé sur le principe de la bonne foi, des griefs juridiques qui étaient déjà connus devant l’instance cantonale ne peuvent être introduits pour la première fois devant le Tribunal fédéral.

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C’est cette règle en particulier qui a causé la perte de la recourante dans la présente affaire: En l’occurrence, le Handelsgericht avait retenu que les propos d’A. constituaient des jugements de valeur (Werturteile) auxquels il fallait appliquer la doctrine et la jurisprudence constantes, à savoir que des jugements de valeur sont, en tant que tels, admissibles dans la mesure où ils sont justifiables, mais qu’ils portent atteinte à la personnalité au sens de l’art. 28 CC s’ils sont inutilement dénigrants. En l’espèce, le tribunal cantonal a admis le caractère dénigrant de certains passages de l’article; l’affirmation notamment que le logo de B. SA devrait dire «par amour pour le profit» plutôt que «par amour pour [les animaux]» a été considéré comme inutilement polémique et, de ce fait, attentatoire à l’honneur de B.

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Le grief invoqué devant le Tribunal fédéral qu’il s’agissait de jugements de valeur mixtes pour lesquels il fallait d’abord examiner si les faits qu’ils contenaient étaient vrais, puis se prononcer sur l’admissibilité du jugement de valeur se fondant sur ces faits, est rejeté par le Tribunal fédéral car, devant l’instance cantonale, la recourante avait encore soutenu que ses propos étaient des purs jugements de valeur. Elle invoquait dès lors de nouveaux arguments juridiques devant le Tribunal fédéral qui, faute d’avoir été provoqués par l’arrêt du Handelsgericht, n’étaient pas admissibles.

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De même, les conclusions de la recourante devant le Tribunal fédéral que le «lecteur moyen» de son journal n’aurait pas compris ses propos comme étant inutilement blessants sont rejetées car, devant le Handelsgericht, elle avait déjà reconnu comment son article a été compris par ses lecteurs. Finalement, constituait également un nouvel argument non admissible l’allégation de la recourante que les conditions préalables à l’octroi de mesures provisionnelles n’étaient pas rendues vraisemblables par B. SA (art. 266 CPC), puisqu’elle aurait pu faire valoir cet argument également devant le Handelsgericht déjà.

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Au demeurant, le Tribunal fédéral confirme l’arrêt cantonal sur le point que le magazine de la recourante n’était pas une publication satirique qui ne pourrait être tenue pour illicite que si elle dépasse les limites inhérentes à sa nature d’exagérer.

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Le recours fut donc rejeté dans son intégralité.

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L’arrêt est avant tout une leçon de droit procédural: pour des motifs évidents, à savoir leur caractère temporaire, la contestation de mesures provisionnelles devant le Tribunal fédéral n’est admise qu’à des conditions étroites. L’art. 99 LTF, qui joue un rôle central dans la présente affaire, prévoit que des nouveaux faits ou moyens de preuves ne sont généralement pas recevables. Même si l’art. 99 LTF ne le prévoit pas expressément, le Tribunal fédéral a rappelé que la bonne foi limite également les motifs de recours; un argument juridique connu devant l’instance cantonale doit être soulevé à ce moment, faute d’être ensuite irrecevable.

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Nous retenons comme message de cet arrêt que, en relation avec des mesures provisionnelles, une nouvelle stratégie d’argumentation devant le Tribunal fédéral est régulièrement inutile, car irrecevable. L’argumentation juridique à adopter doit donc être choisie avec diligence dès le début déjà, puisqu’elle liera la partie respective par la suite, comme le montre ce cas. Une vigilance particulière est de mise lors d’un recours devant le Tribunal fédéral pour violation de l’interdiction de l’arbitraire : dans ce cas (fréquent en pratique), la tentation est grande d’apporter de nouveaux arguments juridiques pour démontrer que la décision de l’instance cantonale a été fausse. La partie qui invoque l’arbitraire doit ainsi veiller à démontrer avec précision pourquoi et dans quelle mesure un éventuel nouvel argument juridique se fonde sur une constatation ou un raisonnement de l’instance précédente.

2. Le mot « Abzocke » (arnaque) dans une publication destinée à des consommateurs n’est pas forcément dénigrant au sens de la LCD (Tribunal fédéral, arrêt 5A_958/2019 du 8 décembre 2020)

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A. est une société (Sàrl) qui fait de la publicité pour ses services d’aide aux locataires. Une cotisation de CHF 95.- par année est demandée aux personnes qui «s’affilient» à cette société. Ces personnes peuvent ensuite bénéficier des services de l’entreprise A. via une hotline payante. Ils peuvent ainsi obtenir des réponses à leurs questions en matière de droit du bail.

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L’émission « Espresso » de la radio SRF et l’émission «Kassensturz» de la télévision SRF ont réalisé plusieurs reportages sur la société A., notamment deux contributions datant de 2013 et 2016. Le premier reportage comporte le titre «Verwechslungsgefahr und Abzocke» («risque de confusion et d’arnaque»), le second montre une photographie du logo de la société avec la légende « Vorsicht vor A.,: Abo-Falle statt seriöser Beratung» («Méfiez-vous de A. : arnaque au lieu de conseils sérieux»). À travers ces deux reportages, plusieurs témoignages d’anciens clients de A. indiquent que le service proposé par la société n’est pas fiable et superficiel, qu’elle profite du fait que son nom est proche de l’association des locataires suisses pour attirer des clients, que la société est fictivement domiciliée et qu’elle possède plusieurs adresses internet pour attirer les clients.

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La société A. intente une action contre la SRF auprès du tribunal de commerce de Berne fondée tant sur le droit de la personnalité (art. 28 sv. CC) que sur le droit de la concurrence déloyale (art. 3 et 9 LCD), tendant à faire interdire à la défenderesse (la SRF) les déclarations suivantes : la société A. obtient frauduleusement des abonnements ; la société est un piège à souscription ; l’offre de la société est une arnaque.

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Le Handelsgericht de Berne rejette la demande dans la mesure où elle est recevable. La société A. recourt au Tribunal fédéral, qui confirme intégralement l’arrêt de l’instance cantonale.

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Sur le plan procédural, l’arrêt du Tribunal fédéral rappelle qu’une action en prévention et/ou en interdiction (art. 9 let. a et b LCD) en raison d’un dénigrement dans les relations d’affaires (art. 3 al. 1 let. a LCD) est de nature pécuniaire, mais qu’elle est susceptible de recours en matière civile devant le Tribunal fédéral nonobstant l’exigence de la valeur litigieuse (art. 74 al. 1 let. b LTF) en raison du lien étroit avec la protection de la personnalité (principe d’attraction).

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Toujours sur le plan procédural, la recourante fait grief au Handelsgericht de ne pas être entré en matière sur sa demande d’interdire à la SRF, «au regard des faits connus à ce jour, de diffuser directement ou par analogie l’affirmation selon laquelle la recourante obtient frauduleusement des frais d’abonnement sans fournir de contrepartie valable en retour». Le Tribunal fédéral précise que la décision de l’instance cantonale est correcte, vu que la recourante n’a pas réussi à établir un lien entre sa demande d’interdiction et les publications de la SRF en question; en effet, cette dernière n’a jamais prétendu que la recourante obtenait des frais d’abonnement frauduleusement mais a plutôt cité l’avis d’un ancien client de la recourante. En ce sens, il n’y a pas de risque de récidive, ce qui aurait pourtant été exigé pour pouvoir admettre la demande de la recourante.

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Sur le plan de droit matériel, il est rappelé que les prétentions fondées sur la protection générale de la personnalité et celles fondées sur la législation spéciale peuvent coexister et que les dispositions du CC et de la LCD peuvent être applicables cumulativement. La question de savoir si une publication porte atteinte à la personnalité (art. 28 CC) ou la dénigre injustement (art. 3 LCD) doit être évaluée de manière objective, en se mettant à la place d’un « lecteur moyen». Dans le cas d’émissions telles que «Espresso» ou «Kassensturz», il faut considérer comme lecteur, auditeur ou téléspectateur «moyen» un consommateur capable d’aborder le sujet en question de manière critique.

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Le Tribunal fédéral examine ensuite minutieusement les différents griefs soulevés par la recourante, mais seul celui se référant au mot «Abzocke» («arnaque») sera discuté ici. Examiné sous le seul angle de l’art. 3 LCD (faute pour la recourante d’avoir attaqué le jugement de première instance, qui avait nié une atteinte à l’honneur au sens de l’art. 28 CC, sur ce point-ci), le Tribunal fédéral décide que ce mot, par ailleurs un jugement de valeur mixte, repose sur des faits qui sont globalement vrais et qu’il ne peut ainsi pas être affirmé que la recourante a été dénigrée par des allégations inexactes ou fallacieuses, telles que requises pour admettre une violation de l’art. 3 al. 1 let. a LCD: «La publication peut être pourvue de certaines exagérations et a fortement exploré les limites de la liberté journalistique, mais elle était en définitive fondée sur un noyau de vérités et n’a pas présenté la recourante sous un jour totalement faux» (consid. 4.3.2). Quant au grief que le mot «arnaque» était «une allégation inutilement blessante» (art. 3 al. 1 let. a i.f. LCD), le Tribunal fédéral rappelle que tel ne pourrait être admis que s› il dépassait les bornes, était totalement hors sujet ou non objectif, et donc insoutenable. Ce n’est pas le cas de la publication en cause: Une plateforme indépendante de consommateurs, telle que les émissions «Espresso» et «Kassensturz», doit pouvoir critiquer la politique de prix d’un acteur du marché avec des mots qui servent d’accroche pour une contribution sans être immédiatement exposée au risque d’un comportement déloyal.

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Le résultat auquel parvient le TF sait convaincre: Bien que le mot «arnaque» (Abzocke; rip-off) soit un terme fort, il fait référence, dans le cas concret, à une pratique commerciale problématique qui avait apparemment donné lieu à de nombreux retours négatifs. Certes, un terme plus nuancé aurait été préférable, mais ce n’est pas la question à trancher par les tribunaux ; l’examen juridique se limite à évaluer si, au vu des faits en cause, l’étiquette «rip-off» dépasse les limites légales. En l’espèce, il semble correct que le TF y réponde par la négative.

3. Traiter une personne d’antisémite sur Facebook est attentatoire à l’honneur : deux nouveaux arrêts (TF, 5A_546/2019 et 5A_561/2019 du 5 février 2020)

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Un internaute s’est exprimé sur la page Facebook d’une association de défense des animaux au sujet de son président en indiquant que celui-ci «pourrait aussi bien arrêter de traiter de juifs d’extrême-gauche tous ceux qui ne partagent pas son antisémitisme » ainsi que «[le président] a aussi diffusé ses paroles antisémites pendant des décennies. Il a été condamné plusieurs fois pour cela». L’association a immédiatement supprimé le commentaire posté sur sa page Facebook. Afin de faire constater l’atteinte subie, elle et son président ont ouvert action contre l’internaute.

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Le Tribunal cantonal de Thurgovie a estimé, en résumé, que les propos avaient porté atteinte à la personnalité du président de l’association. Il a ainsi admis l’action en constatation de l’atteinte du président. Par contre, il a considéré que l’association, en tant que telle, ne disposait pas de la légitimation active, de sorte que son action devait être rejetée. Aussi bien l’internaute que le président et l’association ont saisi le Tribunal fédéral.

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Dans le premier arrêt (5A_546/2019), l’internaute soutenait que le président n’avait plus d’intérêt à faire constater l’illicéité de l’atteinte au sens de l’art. 28a al. 1 ch. 3 CC. En effet, les commentaires litigieux avaient été rapidement supprimés d’Internet, de sorte que très peu d’internautes en avaient pris connaissance. Le Tribunal fédéral a rappelé qu’en matière d’atteintes par voie de presse, l’intérêt à la constatation suppose l’existence d’un trouble (Störungszustand). Tel est notamment le cas lorsqu’il subsiste un doute sur la licéité du comportement qui a pris fin, mais qui pourrait se reproduire à l’avenir. Ces principes valent également, comme dans le cas d’espèce, en cas d’atteinte entre personnes présentes (unter vier Augen) ou dans le cadre d’un cercle limité de personnes.

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Ici, les propos ont été supprimés par l’association même et non par l’internaute. Il existait donc un doute sur l’illicéité des commentaires postés, surtout que l’internaute estimait encore devant le Tribunal fédéral que l’atteinte était justifiée au sens de l’art. 28 al. 2 CC. Dès lors, le président disposait d’un intérêt pour faire constater l’atteinte. A propos des publications, traiter une personne d’antisémite porte évidemment atteinte à la personnalité et s’avérait également illicite dans le cas concret. S’agissant de l’allégation que le président a été condamné plusieurs fois pour discrimination raciale, elle était fausse, car le président n’a été condamné qu’une seule fois en 2000 pour une telle infraction. Dès lors, cette atteinte était également illicite.

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Dans la seconde procédure opposant toujours les mêmes parties (5A_561/2019), l’association et le président avaient saisi le Tribunal fédéral pour des questions plutôt procédurales qui concernaient les mêmes faits que l’affaire 5A_546/2019 ainsi que des faits connexes. En effet, l’internaute avait, en plus, posté d’autres commentaires sur différents sites Internet au sujet de l’association et de son président. Contre ces propos, l’association et le président avaient exigé leur suppression et, subsidiairement, la constatation de leur illicéité. En cours de procédure, l’internaute a supprimé ses commentaires en raison de mesures provisionnelles. Les instances cantonales ont alors considéré que les conclusions principales (suppression de l’atteinte) ainsi que les conclusions subsidiaires (constatation de l’atteinte) étaient devenues sans objet au sens de l’art. 242 CPC.

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Le Tribunal fédéral s’est rallié au jugement de l’instance précédente. Pour les conclusions principales en suppression de l’atteinte, elles étaient devenues sans objet, puisque les mesures provisionnelles avaient imposé à l’internaute de supprimer ses propos. Il n’y avait alors plus d’intérêt juridique à requérir la suppression des contenus déjà retirés. Un éventuel risque de remise en ligne des contenus supprimés n’est pas contré au moyen d’une action en cessation de l’atteinte, mais par le biais d’une action en prévention, qui n’avait pas été déposée.

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S’agissant des conclusions subsidiaires en constatation de l’atteinte, le Tribunal fédéral a rappelé qu’il s’agissait d’un cumul d’actions objectif au sens de l’art. 90 CPC. Le cumul d’actions peut être cumulatif ou subsidiaire. Dans ce dernier cas, le tribunal n’est amené à trancher la conclusion que si la conclusion principale est rejetée et que le demandeur succombe. En l’espèce, l’association et son président n’avaient pas succombé dans leurs conclusions principales. Au contraire, ils avaient obtenu factuellement gain de cause, puisque les commentaires avaient été supprimés. Il convenait alors d’interpréter les conclusions subsidiaires pour déterminer si l’autorité précédente devait les traiter. Le Tribunal fédéral a retenu qu’en l’espèce, il n’y avait aucune raison de s’écarter de l’interprétation littérale des conclusions des recourants qui avaient pris des conclusions subsidiaires: invités à se déterminer, les recourants avaient encore confirmé qu’il s’agissait de conclusions subsidiaires. En outre, ils étaient représentés par un avocat. Si les recourants avaient voulu que les autorités tranchent l’action en constatation, ils auraient dû transformer leurs conclusions subsidiaires en conclusions principales, c’est-à-dire recourir à un cumul d’actions cumulatifs.

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Concernant la légitimation active de l’association pour les propos tenus par l’internaute contre son président, le Tribunal fédéral a confirmé que l’association ne disposait pas de la légitimation active; elle n’était pas directement touchée dans sa personnalité par les publications litigieuses, bien qu’elle fût identifiable.

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Enfin, affirmer sur Internet que le président de l’association avait été condamné pour discrimination raciale était licite. Certes, cette affirmation portait atteinte à son honneur et à sa vie privée. Cependant, elle était vraie et se justifiait au regard de la liberté d’expression de l’internaute et du fait que le président est une personne ayant acquis une notoriété passagère (relative Person der Zeitgeschichte) qui doit supporter plus qu’une personne ordinaire. Enfin, le président avait lui-même thématisé à plusieurs reprises sa condamnation dans les médias qui remontait pourtant à 2000 et qui avait été effacée de son casier judiciaire. En revanche et comme déjà retenu, l’internaute a violé l’art. 28 CC en affirmant que le président avait été plusieurs fois condamné.

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Ces deux jugements concernaient la même association et le même président que les deux arrêts du Tribunal fédéral du 30 avril 2019 (5A_801/2018 et 5A_773/2018) qui avaient fait l’objet de notre publication du 7 octobre 2020 dans Medialex[1]. Les faits et les arguments des parties étaient également semblables. Le Tribunal fédéral s’est donc logiquement référé à ses arrêts du 30 avril 2019 lorsqu’il a apprécié la licéité des allégations en lien avec le prétendu antisémitisme du président de l’association ou la légitimation active de l’association.

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S’agissant de la question de l’intérêt en lien avec l’action en constatation de l’atteinte, le Tribunal fédéral a récemment rendu un arrêt destiné à la publication (TF, 5A_247/2020 du 18 février 2021) qui clarifie la condition du trouble persistant ainsi que les règles relatives à sa preuve. Cet arrêt fera l’objet d’un commentaire lors de l’aperçu de la jurisprudence rendue en 2021 en lien avec les médias.

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Enfin, dans son arrêt du 5 novembre 2020 (5A_440/2020), le Tribunal fédéral a été une nouvelle fois appelé à trancher un cas concernant le président de l’association. Dans cette affaire, ce dernier avait attaqué une avocate dont le client avait aimé sur Facebook un poste qui traitait le président de raciste et d’antisémite. Dans le cadre de son mandat, l’avocate avait indiqué à un journaliste que le président avait fait l’objet d’une condamnation pour discrimination raciale entrée en force. Le président a estimé que cette révélation violait sa personnalité. Le Tribunal fédéral a retenu que la suppression d’une condamnation au casier judiciaire ne signifie pas encore qu’elle ne peut plus être évoquée, notamment dans la presse. Il s’agit bien plus de peser les intérêts en présence. Or, ici, l’avocate était en droit de communiquer cette information au journaliste. Pour parvenir à cette conclusion, le Tribunal fédéral a repris les arguments déjà invoqués dans les affaires 5A_546/2019 et 5A_561/2019 qui viennent d’être résumées : le président était une personne jouissant d’une certaine notoriété, l’information était vraie et l’intérêt à la resocialisation du président était faible, puisqu’il avait lui-même abordé sa condamnation dans les médias.

III. Arrêts cantonaux

1. Evoquer que le nom d’un trader figure dans un document d’enquêteurs américains n’est pas constitutif d’une atteinte illicite (Cour de justice de Genève, arrêt du 31 août 2020, ACJC/1229/2020)

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Un site publiant une newsletter spécialisée dans la criminalité économique avait diffusé un article indiquant, en substance, que des enquêteurs américains s’étaient basés dans le cadre d’un procès pour délits d’initiés sur des relevés de transactions impliquant deux sociétés contrôlées par le trader A. L’article précisait que ces deux sociétés avaient fait l’objet de poursuites en 2011, mais qu’elles avaient été classées par la suite. A. et sa société, qui étaient nommés dans l’article de la newsletter, ont requis des mesures superprovisionnelles et provisionnelles contre les fondateurs du site Internet et la société qui édite la newsletter. Le tribunal de première instance du canton de Genève a admis dans les grandes lignes les mesures superprovisionnelles, mais a rejeté les mesures provisionnelles en estimant que les conditions de l’art. 266 CPC n’étaient pas remplies.

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Saisie par le trader et sa société, la Cour de justice a souligné que l’art. 266 CPC pose des conditions restrictives pour ordonner des mesures provisionnelles à l’encontre de médias périodiques afin d’éviter la censure. Pour accorder de telles mesures, il doit ainsi «sauter aux yeux du tribunal qu’il n’existe pas de motif justificatif au sens de l’art. 28 al. 2 CC effaçant l’illicéité de l’atteinte, tel l’intérêt public prépondérant». La Cour de justice a repris la jurisprudence fédérale qui exige que la personne qui requiert des mesures provisionnelles doit prouver avec une quasi-certitude l’existence d’un préjudice particulièrement grave (art. 266 lit. a in fine CPC) et l’absence manifeste de justification de l’atteinte (art. 266 lit. b CPC)[2].

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Ensuite, la Cour de justice a rappelé les principes en matière d’atteintes par la presse : un média peut porter atteinte, soit par l’allégation de faits, soit par l’impression que ceux-ci en donnent. Il convient de faire preuve de prudence lorsqu’un article relate qu’une personne est soupçonnée d’avoir commis un acte délictueux, en adoptant une formulation qui fasse comprendre avec suffisamment de clarté aux yeux du lecteur moyen qu’il s’agit en l’état d’un simple soupçon. Selon la jurisprudence constante, la révélation d’un fait vrai est licite, sauf si la personne est inutilement rabaissée ou que le fait concerne sa sphère intime ou privée. Toutefois, le besoin du public à être informé peut justifier l’atteinte à la vie privée, ce qui impose de peser les intérêts en présence.

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In casu, la Cour de justice n’a vu aucune raison de s’écarter de l’opinion de l’instance inférieure: les affirmations du journal étaient globalement exactes et le trader n’était pas rabaissé de manière inutile ou atteint dans sa sphère privée. Certes, l’article laissait entendre que le trader et ses sociétés étaient des protagonistes dans une affaire de délits d’initiés, ce qui n’était pas accrédité par les pièces au dossier et donc vraisemblablement faux. Toutefois, cette erreur était ensuite corrigée par l’article qui précisait, à la phrase suivante, que leur nom était uniquement apparu en lien avec des relevés bancaires. La Cour de justice a donc estimé que l’imprécision de l’article était rectifiée. En tout état de cause, le seuil de gravité du préjudice particulièrement grave n’était pas atteint, surtout au vu du nombre restreint d’abonnés à la newsletter, soit 215. En outre, il existait vraisemblablement un intérêt public à informer les professionnels de la finance (qui s’étaient abonnés à la newsletter payante) des évènements en lien avec le trader et ses sociétés.

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Cet arrêt semble aller très loin en admettant que traiter une personne de protagoniste dans une affaire criminelle n’est pas contraire à ses droits de la personnalité, alors qu’en réalité, le nom du trader ou de ses sociétés était uniquement apparu dans des relevés bancaires en possession d’enquêteurs américains, sans plus. Certes, selon la jurisprudence, une inexactitude ou une imprécision ne suffit pas à elle seule à rendre un article de presse faux dans son ensemble. Il faut encore que l’affirmation inexacte porte sur un point essentiel de l’article et rabaisse la personne dans la considération de ses semblables (arrêt du TF du 23 février 2012, 5A_641/2011 c. 7.2.2.1). Toutefois, ici, le rôle (principal ou non) joué par le trader dans une affaire criminelle de délit d’initiés est certainement un point essentiel aux yeux du lectorat. En outre, l’information inexacte est de nature à présenter le trader et ses sociétés sous un mauvais jour en les rabaissant. L’affirmation étant fausse, l’illicéité de l’atteinte aurait dû être retenue. Le fait que l’atteinte doit être particulièrement grave au sens de l’art. 266 CPC n’y changeait rien : traiter une personne de protagoniste dans une affaire criminelle, alors qu’il n’en est rien, est suffisamment grave pour atteindre le seuil requis. Certes, le nombre de lecteurs limités, soit 215, pouvait jouer un rôle dans la gravité de l’atteinte, ce qui nous amène à la deuxième remarque.

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La qualification de la newsletter en tant que média à caractère périodique, exigence nécessaire afin de pouvoir bénéficier du régime de l’art. 266 CPC, n’a même pas été abordée, ce qui laisse penser à quel point cette conclusion était évidente. Cela était d’autant plus vrai que les fondateurs du site sont des journalistes d’investigation qui publient régulièrement des articles sur leur site. Toutefois, le nombre d’abonnés, soit 215 au moment du jugement de première instance, aurait pu jouer un rôle par rapport à l’exigence de publicité requise pour être en présence d’un média. En effet, la notion de média suppose que l’information soit diffusée auprès d’un nombre important de personnes. A cette fin, le nombre des destinataires joue naturellement un rôle important, sans toutefois constituer un critère décisif[3]. A notre avis, la Cour de justice ne pouvait pas argumenter que l’atteinte n’était pas grave en raison du cercle limité de lecteurs, tout en considérant qu’elle était en présence d’un média; soit elle estimait que la newsletter était un média, de sorte que le nombre de lecteurs ne devait pas jouer de rôle essentiel, soit elle estimait que le lectorat était très limité, ce qui excluait la gravité de l’atteinte, mais du même coup la notion de média.

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Enfin, la Cour de justice a repris la jurisprudence du Tribunal fédéral qui exige une quasi-certitude s’agissant des conditions de l’existence d’un préjudice particulièrement grave et de l’absence manifeste de justification de l’atteinte. Pourtant, la jurisprudence des tribunaux suisses-allemands ultérieure aux arrêts du Tribunal fédéral de 2011 et 2012[4] ainsi qu’une partie importante de la doctrine[5] s’écartent de ce degré de preuve et retiennent qu’il suffit de prouver la simple vraisemblance de ces conditions conformément au régime ordinaire des mesures provisionnelles. Récemment, la jurisprudence du TF a toutefois confirmé l’exigence de la quasi-certitude[6]. La Cour de justice n’a pas abordé la controverse et n’a pas insisté sur l’exigence de la quasi-certitude, ce qui semble signifier qu’elle n’a pas voulu se positionner par rapport au degré de preuve requis. Dans tous les cas, si elle avait retenu que les conditions du préjudice particulièrement grave et de l’absence manifeste de justification de l’atteinte nécessitaient la simple vraisemblance, le résultat aurait certainement été identique au vu du raisonnement de la Cour de Justice.

2. «Attrape-moi si tu peux» ne viole pas les droits de la personnalité (Tribunal cantonal vaudois, arrêt du 29 octobre 2020, HC/2020/732)

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Cet arrêt vaudois concernait la même newsletter que l’arrêt genevois (cf. no III. 1.), mais opposait cette fois le média à un homme d’affaires. L’article portait le titre «Attrape-moi si tu peux» et précisait notamment que l’homme d’affaires (nommé) avait transformé l’art d’échapper à ses créanciers en discipline olympique. L’homme d’affaires avait ensuite déposé des mesures provisionnelles et superprovisionnelles, toutes rejetées, et a saisi le Tribunal cantonal.

43

Celui-ci a d’abord rappelé de manière très complète les principes applicables en matière d’atteintes par les médias et a insisté plusieurs fois sur le fait que le degré de preuve requis pour ordonner des mesures provisionnelles contre des médias au sens de l’art. 266 CPC est la quasi-certitude.

44

Ensuite, il s’est penché sur les arguments de l’homme d’affaires. Celui-ci estimait premièrement que le titre de l’article en question créait un lien volontaire avec le bestseller américain «Catch me if you can» qui relate les aventures d’un escroc. Pour le Tribunal cantonal et au stade de quasi-certitude, le lectorat moyen du média concerné ne faisait pas de lien entre le titre de l’article litigieux et le bestseller américain. En effet, le titre litigieux avait plutôt pour but d’attirer l’attention du lecteur et faisait référence aux prétendus créanciers de l’homme d’affaires qui peinaient à obtenir le remboursement de leurs créances. Il n’avait pas pour but de dépeindre l’homme d’affaires comme un escroc.

45

S’agissant du fond de l’article, l’homme d’affaires le considérait comme mensonger et allant plus loin que la simple description des faits retenus par plusieurs arrêts du Tribunal fédéral. Ce raisonnement n’a pas été suivi par le Tribunal cantonal: de nombreux articles de presse relataient que l’homme d’affaires serait le débiteur de créances importantes. En outre, les juges ont retenu que l’hommes d’affaires est une personnalité de l’actualité contemporaine relativement connue. Au regard de ce qui précède, le Tribunal cantonal a confirmé que l’article litigieux ne causait pas d’atteinte illicite à la personnalité de l’homme d’affaires.

46

Cet arrêt présente de nombreuses similarités avec le précédent (n° III.1.) et le résultat juridique est identique: les mesures provisionnelles ont été rejetées. La remarque concernant la notion de média à caractère périodique peut être reprise (n° III.1.). En effet, le Tribunal cantonal vaudois n’y a consacré aucun considérant, quand bien même il a relevé que le 19 mars 2020, la newsletter ne comptait que 195 abonnés.

47

En revanche, le Tribunal cantonal a insisté à plusieurs reprises sur le degré de la preuve requis pour obtenir des mesures provisionnelles ou superprovisionnelles à l’encontre d’un média à caractère périodique: il s’agit de la quasi-certitude. Là encore, les juges vaudois ne se sont pas penchés pas sur la jurisprudence des cantonaux alémaniques et la doctrine relative à cette disposition. Ils ont plutôt suivi la jurisprudence fédérale sans relever les approches alternatives. En raison de ces deux arrêts romands, il semble qu’une distinction entre les cantons romands et les cantonaux alémaniques se soit créée au sujet du degré de preuve pour requérir des mesures provisionnelles sur la base de l’art. 266 CPC: les cantons romands exigent la quasi-certitude en se fondant sur la jurisprudence fédérale, alors que les cantons alémaniques semblent se limiter à la vraisemblance ordinaire.

48

Si le résultat de l’arrêt est convaincant, on peut toutefois regretter que l’analyse ne distingue pas clairement l’existence d’une atteinte et ses motifs justificatifs. En effet, à la lecture de l’arrêt, on ne saisit pas si le droit à l’honneur et à la vie privée est atteint ou si le comportement du média était licite en raison de motifs justificatifs. Dans tous les cas, il faut reconnaître que le raisonnement en lien avec la personnalité publique de l’homme d’affaires est précipité: après avoir reconnu la notoriété de l’homme d’affaires, le Tribunal cantonal a conclu qu’ «il s’ensuit que l’intérêt du public – singulièrement le public cible [du média en cause] qui compte aussi des investisseurs parmi les abonnés ayant accès à l’intégralité des articles de son site Internet – à connaître les démarches et les procédures judiciaires opposant l’appelant à ses créanciers est prépondérant». Or, le fait que l’homme d’affaires soit une personnalité publique ne permet pas encore de retenir automatiquement que le besoin d’information du public était prépondérant. Il fallait bien plus peser les circonstances du cas concret.

49

Enfin, d’un point de vue pratique, il convient de souligner l’approche stratégique du média (et certainement de son conseil). En effet, le média a d’abord été abordé de manière extrajudiciaire par l’homme d’affaires qui lui a demandé de retirer l’article litigieux. Le média s’est exécuté sans reconnaissance de responsabilité et a précisé qu’il examinerait le bien-fondé des reproches. Une fois l’analyse effectuée (ou approfondie), le média a remis en ligne l’article en indiquant que celui-ci s’inscrivait dans les limites légales. Ce laps de temps a alors permis à l’avocat du média de déposer un mémoire préventif auprès du tribunal de première instance au sens de l’art. 270 CPC, ce qui a probablement permis d’obtenir le rejet des mesures superprovisionnelles.

3. Une atteinte à la personnalité ne donne pas droit à la publication d’excuses (n° 2) (Obergericht Zug, arrêt du 18 août 2020, Z1 2019 17)

50

Il s’agit de l’arrêt de deuxième instance dans l’affaire «Spiess-Hegglin», très médiatisée en Suisse alémanique (mais pas «dans le monde entier», comme le prétend l’arrêt au considérant 4.4.3). Les faits ont été exposés dans notre aperçu de la jurisprudence de droit privé de l’année 2019[7] et ne sont rappelés ici que brièvement: Le Blick avait rapporté un scandale sexuel impliquant le président de l’UDC de Zoug et la parlementaire verte Spiess-Hegglin. Cette dernière a ensuite ouvert action contre le quotidien pour atteinte à sa personnalité, demandant, entre autres, une réparation du tort moral subi ainsi que des excuses formelles, à publier dans le Blick. La première instance a admis une atteinte à la sphère intime grave de la part du journal, ordonné le versement de CHF 20’000 à titre de réparation du tort mal, mais rejeté la demande en excuses.

51

Spiess-Hegglin fait appel. L’Obergericht de Zoug confirme l’atteinte grave à sa personnalité. Par contre, il réduit la somme à titre de réparation du tort moral à CHF 10’000: Si l’atteinte a été grave et qu’elle a causé à la recourante un préjudice moral considérable, son illicéité a toutefois été constatée par le tribunal (art. 28a al. 1 ch. 3 CC), ce qui procure déjà une réparation certaine. Puisque l’art. 49 CO n’a pas de caractère pénal, que seul un article est en cause, que cet article reprend largement le récit de la recourante sans critiquer son comportement ni dénigrer sa personnalité d’une quelconque autre manière, et en tenant compte, finalement, de la jurisprudence en matière de réparation du tort moral, le tribunal juge approprié de diminuer la somme accordée en première instance de la moitié.

52

Il refuse également de donner suite à la demande portant sur des excuses. L’Obergericht se rallie à l’avis du Tribunal fédéral[8] selon lequel les tribunaux ne peuvent contraindre quiconque à s’excuser sous la menace d’une sanction par voie d’injonction puisque ce serait contraire à la nature des excuses même, comprises comme déclaration volontaire et sincère du contrefacteur. Par ailleurs, on verrait mal en quoi des excuses ordonnées seraient censées atténuer la détresse émotionnelle subie.

53

L’arrêt modifie également la répartition des frais de justice : l’instance inférieure avait condamné le Blick à payer l’intégralité des frais et à verser à Spiess-Hegglin une indemnité (Parteientschädigung) non réduite de presque CHF 22’000. Pour ce faire, le tribunal de première instance avait notamment tenu compte du fait que la demanderesse l’avait emporté avec sa demande principale et que sa demande en réparation du tort moral était approuvée sur le principe. Le fait que le montant accordé ne correspondait qu’à 2/5 de l’indemnité réclamée, que la demande d’injonction (art. 28a al. 1 ch. 1 CC) fut rejetée, au même titre que celle de publication d’excuses, pouvait, aux yeux des juges de première instance, être ignoré et était de toute façon contrebalancé par le comportement du défendeur, qui niait catégoriquement avoir violé la personnalité de la demanderesse et refusait toute obligation découlant de ce fait.

54

Le Kantonsgericht a ainsi outrepassé son pouvoir d’appréciation, décide l’Obergericht. Le dernier argument, en particulier, est sans aucune pertinence; une partie est libre de s’opposer de manière claire à une action ou à des revendications, tant sur le principe que sur la question du montant. En plus, les points sur lesquels la demanderesse n’a pas obtenu gain de cause ne sont pas mineurs au point de pouvoir être ignorés. L’Obergericht ordonne donc que le Blick paie 4/5 des frais de justice devant l’instance inférieure et la demanderesse 1/5, et il réduit également l’indemnité due à Spiess-Hegglin de 2/5. La même répartition est appliquée aux frais de justice respectivement à l’indemnité due à la recourante devant l’Obergericht.

55

Comme nous l’avons retenu dans notre dernier aperçu, la question la plus controversée porte sur l’admissibilité d’une demande d’obtenir des excuses de l’auteur de l’atteinte[9]. Le Tribunal fédéral l’a nié dans un arrêt de 2013[10], et les tribunaux zougois ne s’y sont pas écartés. Notre pronostic[11] que le TF pourrait à nouveau être appelé à trancher ce point sur la base de cette affaire ne s’est pas réalisé, car les parties n’ont pas recouru contre la présente décision. Le CEO de Ringier, maison d’édition du Blick, s’est excusé auprès de la recourante six jours après que l’arrêt de l’Obergericht a été rendu[12]; il l’a fait sans y avoir été obligé, de son propre gré, ce qui est sans doute le meilleur motif.

56

La réparation du tort moral reste à notre sens relativement élevée (cf. notre commentaire sur l’arrêt du TC St-Gall, III.4.), ce qui vaut également pour la part des frais de justice et d’avocat à payer par le journal. Mais il s’agit tant pour l’un que pour l’autre de questions d’appréciation et dont le résultat reste dans les limites imposées par la loi.

4. Une campagne médiatique dégénérant en diffamation systématique porte atteinte à la personnalité (Kantonsgericht St. Gallen, arrêt du 6 juillet 2020, BO.2018.28-32)

57

L’«Obersee Nachrichten» (abrégé «ON») est un journal qui paraît une fois par semaine et est distribué dans tous les ménages d’une grande partie de la région «See-Gaster» dans le canton de St-Gall; le tirage dépasse 60’000 exemplaires. Le journal dispose d’une page internet et d’une page Facebook qui reprennent les articles publiés sous forme papier.

58

De la fin du mois de septembre 2014 au début du mois d’août 2016, l’ON publie à travers 50 éditions plus de 130 contributions en rapport avec la «KESB Linth» et son président. Un dossier «APEA Linth» est créé sur le site web de ON ainsi qu’un dossier séparé intitulé «APEA» (autorité de protection de l’enfant et de l’adulte). Les publications traitent notamment de différents cas devant l’APEA, tirent des conclusions et discutent les rapports entre les différents acteurs du système régional de protection sociale, souvent sur un ton méprisant. Ainsi, des affirmations comme «folie sociale», «l’APEA a kidnappé mon petit-fils», «Verdingkinder», «organisation hautement criminelle», «dictature prime droits de l’homme», «droits de l’enfant bafoués», «l’APEA oblige la mère à arrêter d’allaiter», «guerre psychologique», «autorité perçue comme terroriste» s’y trouvent. Le président de l’APEA est caractérisé de «tyran» sans «intégrité éthique» et aurait dit à un citoyen qu’il le ferait «interner en psychiatrie». Les citations font 21 pages dans l’arrêt du Tribunal cantonal.

59

Ces expressions se trouvent d’une part dans le texte rédactionnel – soit en étant celles utilisées par le journaliste soit des citations de personnes interviewées par le journal – et d’autre part dans les commentaires que laissent les lecteurs de l’hebdomadaire.

60

Le président de l’APEA ainsi que la Ville Rapperswil-Jona ouvrent action pour atteinte à leur personnalité. Ils demandent notamment la suppression d’archives en ligne comprenant 276 passages dans lesquels apparait le président de la KESB, la suppression de 75 commentaires sur la page Facebook d’ON, la constatation de diverses atteintes à la personnalité des demandeurs et l’injonction faite aux défendeurs d’utiliser ces mêmes mots caractérisés d’illicites dans des futures reportages concernant les affaires qui ont donné lieu à cette campagne médiatique.

61

Les demandeurs demandent en outre la remise d’un gain à quantifier après l’obtention de preuves (bénéfice estimé à au moins CHF 100’000) ainsi que l’obligation solidaire faite à tous les défendeurs de payer une somme à titre de réparation du tort moral subi par le président de l’APEA de CHF 25’000 plus intérêts, à verser à une organisation caritative.

62

L’instance précédente ordonne le marquage des passages incriminés dans les articles archivés d’ON, accompagné à chaque fois d’un commentaire en rouge attestant de leur caractère illicite. Le tribunal ordonne en outre la suppression de plusieurs articles et commentaires Facebook ainsi que la publication du jugement sur les divers canaux d’ON. La demande en réparation du tort moral est rejetée et la question de la remise du gain renvoyée à une procédure séparée.

63

Les deux parties recourent contre l’arrêt.

64

Le Tribunal cantonal de St-Gall confirme l’arrêt de première instance dans son intégralité. Selon lui, il n’a pas de doute que l’ON, son rédacteur-en-chef et son rédacteur ont orchestré, à travers onze affaires délicates qui avaient occupé l’APEA (dont l’affaire «Marco H.»), une véritable campagne médiatique qui, à chaque fois, a porté atteinte aux droits de la personnalité du président de l’APEA ainsi qu’à la Ville de Rapperswil-Jona. «En effet, les lecteurs ont dû lire à plusieurs reprises le même point de vue subjectivement coloré sous différents déguisements ; en particulier, les explications sur le contexte de la mesure étaient si incomplètes, tendancieuses et trompeuses qu’il n’était pas possible, même pour un lecteur particulièrement critique, de saisir ou de comprendre de manière raisonnablement précise les considérations de l’APEA Linth … Dans l’ensemble, le reportage doit donc être qualifié de mensonger, les articles individuels contenant également des déclarations ou des allégations mensongères, que les défendeurs n’ont pas pu prouver. Contrairement à ce qu’affirment les défendeurs, les demandeurs ne pouvaient pas simplement réfuter les fausses informations et les allégations sans fondement car ils étaient légalement tenus au secret. En somme, le lecteur moyen a été indiscutablement amené à croire que le KESB Linth et son président, par leurs exigences excessives, leur incompétence, leur froideur, leur arrogance et leur soif de reconnaissance, ont agi d’une manière gravement contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant et n’ont même pas hésité à bafouer les droits humains élémentaires. Le langage désobligeant a sans doute aussi contribué à la figure misérable de la KESB Linth et [de son président] qui est reflétée tout au long du reportage.»

65

Le Tribunal cantonal va même plus loin que l’instance précédente, en interdisant aux défendeurs d’afficher dans leurs publications certains mots dans des futurs reportages portant sur les onze affaires précitées, tels que «tyran», «enlèvement», «déportation», «prison», «barbare» ou  «scandaleux». Il accorde en outre au président de l’APEA une somme à titre de réparation du tort moral de CHF 8’000.

66

Quant aux frais de procédure, le Tribunal cantonal corrige légèrement la répartition des frais de justice devant la première instance et confirme l’obligation pour les défendeurs de supporter les frais d’avocat (réduits) des demandeurs solidairement. Les frais de justice devant le TC sont partiellement répartis entre les parties, et les défendeurs obligés de payer les frais d’avocat des demandeurs.

67

L’arrêt traite d’une campagne médiatique particulièrement virulente contre une autorité de protection de l’enfant et de l’adulte. L’affaire n’est d’ailleurs pas encore close, les défendeurs ayant déposé un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral[13]. A notre sens, il n’y a pas de véritable doute que la campagne montée par ON dépasse le cadre posé par l’art. 28 CC : l’information du public et le discours public sont des aspects centraux dans une société libre et libérale; ils ne sont toutefois pas sans limite. Il est évident que les informations données par un média doivent respecter un minimum d’objectivité pour pouvoir être qualifiées de contribution au discours public au sens du terme, faute de quoi la couverture médiatique dégénère en diffamation systématique. Il semble qu’ici, la façon peu critique avec laquelle le média reprenait les points de vue de personnes directement concernées, la reproduction fidèle d’un langage parfois très peu contrôlé, l’intensité et la durée de la couverture rendent cette campagne déséquilibrée à un point qui dépasse les limites du supportable, ce qui est confirmé par le grand nombre de commentaires de lecteurs qui emploient des expressions en soi attentatoires à l’honneur.

68

Il est ainsi à juste titre que le Tribunal cantonal a admis l’atteinte illicite à l’égard du président – et de la Ville de Rapperswil-Jona, en tant qu’organisme responsable de l’APEA Linth, ce qui nous rappelle que les communautés publiques dotées de personnalité jouissent elles aussi de la protection des art. 28 sv. CC (cf. notamment ATF 128 III 401 ; 112 III 369). L’interdiction prononcée à l’adresse des défendeurs d’utiliser, ou de laisser subsister, un nombre des mots nous semble proportionnée dans la mesure où cette injonction se limite strictement à la future couverture des onze affaires de l’APEA qui ont été à la base de la campagne médiatique et que les expressions interdites sont des mots attentatoires à l’honneur en soi. Le fait que nombre de ces expressions étaient soit des citations de personnes concernées par les mesures de l’APEA reprises dans les articles rédactionnels, soit des commentaires de lecteurs n’enlève pas la responsabilité de l’ON, respectivement de son rédacteur-en-chef et du rédacteur responsable du dossier. Quant aux citations reprises, le média est obligé d’effectuer un minimum de contrôle quant à leur véracité[14] et de tempérer le ton si nécessaire. Concernant les commentaires de lecteurs, le média, en tant qu’hébergeur de contenu, doit veiller à ce qu’ils ne portent pas atteinte. Dans un cas comme celui-ci, où le média lui-même provoque, par le contenu et le style de rédaction choisi, un débat parmi ses lecteurs dont on peut prédire qu’il dérapera, le média est sous l’obligation de surveiller l’espace «commentaires» et de supprimer de son propre chef les propos attentatoires à la personnalité.[15]

69

Quant à la réparation du tort moral, le montant de CHF 8’000 nous semble à la limite inférieure de ce qu’on pourrait accorder ; dans l’affaire Spiess-Hegglin, p.ex., la deuxième instance a alloué la somme de CHF 10’000 pour atteinte par un article unique[16]; dans le cas d’une campagne médiatique orchestrée, comme en l’espèce, on ne devrait, en règle générale, pas rester en dessous des sommes accordées pour un faux pas unique. D’un autre côté, on peut voir une certaine satisfaction pour le demandeur dans le fait que tant le rédacteur-en-chef que le rédacteur responsable ont été licenciés, ce qui pourrait, en l’occurrence,  justifier un montant à titre de réparation moins élevé. On peut relever que la demande du plaignant à verser la somme non pas à lui mais à une organisation caritative est particulière, mais tout à fait admissible[17]. La doctrine y voit une sorte de «peine privée»[18]. À notre sens, il s’agit d’une satisfaction sui generis qui consiste dans le fait que l’auteur de l’atteinte répare le préjudice moral non seulement en s’acquittant d’une somme mais aussi en la versant à un tiers qui, normalement, sera choisi par le demandeur avec soin, p.ex. un organisme qui a justement pour but d’empêcher des atteintes telles que commises par le débiteur. D’où pourrait se poser la question – non soulevée ici – des limites quant au choix du tiers bénéficiaire; car ce choix ne doit pas porter atteinte à la personnalité du débiteur non plus (p.ex., condamner l’auteur de propos d’extrême droite à verser la somme à titre de réparation du tort moral due à la victime à une association ultra-communiste).

70

Enfin, l’arrêt pose quelques questions intéressantes quant à la répartition des frais de justice et ceux d’avocats, et il soulève également la question de la responsabilité solidaire de ces frais qu’il nous semble pourtant judicieux de traiter dans une publication séparée.

IV. Résumés succincts

71

1. Dans l’affaire opposant l’ancien Conseiller d’Etat Pierre Maudet à Tamedia au sujet d’un droit de réponse, l’entreprise de médias avait succombé en première instance et avait dû publier une réponse (art. 28g CC). Tamedia a recouru contre ce jugement, mais uniquement s’agissant des frais et dépens. La Cour de justice de Genève a confirmé que l’instance précédente n’avait pas outrepassé son pouvoir d’appréciation en mettant à la charge du média l’entier des frais de la procédure. En effet, Pierre Maudet avait obtenu gain de cause sur le principe même du droit de réponse, alors que Tamedia estimait que les conditions n’étaient pas remplies. Le texte proposé par Pierre Maudet a certes été modifié afin de satisfaire les conditions de l’art. 28g CC, mais seuls 40 mots environ ont été modifiés sur plus de 200 (arrêt de la Cour de justice du canton de Genève du 14 janvier 2020, ACJC/117/2020).

72

2. Une affaire argovienne concernait cette fois un article du Blick paru sur Internet qui indiquait que «endetté et encore arnaqué par des usuriers; le musicien bernois X à la santé fragile est tombé dans une arnaque pourrie». Saisie par les sociétés qui auraient prétendument escroqué le musicien bernois, le Handelsgericht a d’abord examiné les questions de droit international privé (les sociétés avaient leur siège à l’étranger), puis l’intérêt à obtenir un jugement en constatation de l’atteinte. Après avoir rappelé les principes applicables en droit des médias, le Handelsgericht est parvenu à la conclusion que, dans le cas concret, les termes d’escroc et d’usurier n’étaient pas illicites au sens de l’art. 28 CC. Les juges sont parvenus à la même conclusion en appliquant la LCD (arrêt du Handelsgericht du canton d’Argovie du 29 mai 2020, HOR.2019.45).

73

3. Le Tribunal administratif zurichois a traité la demande d’une journaliste qui souhaitait accéder au dossier judiciaire d’un meurtrier très médiatisé outre-Sarine et vraisemblablement décédé. L’accès a été refusé en première instance sur la base de la loi cantonale relative à l’information et à la protection des données, mais le Tribunal administratif zurichois a partiellement annulé cette décision et a renvoyé l’affaire à l’autorité de première instance. Cet arrêt présente un intérêt spécifique en abordant les droits de la personnalité d’une personne décédée, respectivement de ses proches (arrêt du Verwaltungsgericht du canton de Zurich du 9 juillet 2020, VB.2020.00026).

74

4. De manière similaire, la Cour d’appel pénal de Fribourg a ordonné qu’il soit donné accès à une journaliste de «Radio Freiburg» à deux arrêts anonymisés de 2003 et 2004 rendus en relation avec une fusillade à Morat. Plusieurs personnes s’y étaient opposées, faisant valoir leur droit à l’oubli et au respect de la vie privée qui seraient violés au cas où les arrêts pourraient être consultés par la journaliste. Après une pesée des intérêts, la Cour considère que l’intérêt public à l’information prime l’intérêt privé des intimés au maintien d’un secret (en l’occurrence très relatif, puisque, la cause ayant été portée devant le Tribunal fédéral à l’époque, de nombreux éléments sont déjà largement accessibles au public) (Ordonnance de la Cour d’appel pénal de Fribourg du 15 juillet 2020, 501 2020 90).

75

5. Le demandeur requiert pour l’essentiel la constatation du caractère illicite d’une lettre de lecteur qui dit que le demandeur est un «fou qui concocte des thèses confuses». La même demande est faite concernant un commentaire sur Facebook qui contient, à la fin, le passage suivant : «C’est pourquoi nous avons besoin de la norme pénale antiraciste. D’ailleurs, j’ai déjà dit tout cela à […] en personne. Mais il ne le comprend pas ou ne veut pas le comprendre. Et à […] : c’était un dangereux criminel, un antisémite malfaisant et un rabatteur, et s’il périt maintenant en prison, c’est de sa propre faute et je m’en fiche complètement. D’ailleurs, la même chose s’applique [au demandeur]: Ce sont toujours les mêmes théories stupides.» L’action du demandeur est rejetée: La lettre de lecteur a entretemps été retirée d’Internet, de sorte qu’il manque un Störerzustand; le commentaire sur Facebook ne dépasse pas les limites posées par l’art. 28 CC: il s’agit d’un jugement de valeur qui, vu les circonstances (commentaire sous une rubrique signalée de subjective [«Sommerdebatte»], commentaire «en passant»), est tolérable (Bezirksgericht Zürich, ZR 2020, 173).

76

6. Sur le plan européen, La Cour de Justice a rendu plusieurs arrêts en relation avec la protection des données à caractère personnel que nous nous contentons de mentionner ici sans les présenter: VQ c. Land Hessen, C-272, du 9 juillet 2020; Orange România SA c. Autoritatea Naţională de Supraveghere a Prelucrării Datelor cu Caracter Personal, C-61/19, du 11 novembre 2020; Privacy International c. Secretary of State for Foreign and Commonwealth Affairs et al., C. 623/17, du 6 octobre 2020; Data Protection Commissioner c. Facebook Ireland Ltd, Maximilian Schrems, C.311/18, du 16 juillet 2020 («Schrems II»). Le dernier arrêt notamment a fait l’objet de nombreuses publications[19].


 

Notes de bas de page:

  1. Fountoulakis/Francey, Medialex 8/2020.

  2. Pour cette jurisprudence, voir TF, 23.02.12, 5A_641/2011 consid. 7.1 et TF, 20.06.11, 5A_706/2010 consid. 4.2.1.

  3. Steinauer/Fountoulakis, Personnes physiques et protection de l’adulte, Berne 2014, no 617.

  4. Voir notamment arrêt de l’Appellationsgericht Basel-Stadt, 28.08.2018, ZB.2018.26, résumé dans Fountoulakis/Francey, Medialex 1/2019 no 27 ss; arrêt du Handelsgericht Zurich, 29.06.2017, ZR 116/2017 p. 226 ss consid. 4.2, résumé dans Fountoulakis/Francey, Medialex 2018 p. 94 ss, p. 99.

  5. Voir notamment Heinzmann/Bacher, Medialex 2013 p. 159 ss, p. 160; KUKO Kofmel-Ehrenzeller, Art. 266 ZPO n° 3.

  6. Arrêt du TF, 22.04.2020, 5A_956/2018 consid. 2.

  7. ….

  8. TF, 04.11.2013, 5A_309/2013, consid. 6.3.3.

  9. Fountoulakis/Francey, Medialex 8/2020, II.2.

  10. TF, 04.11.2013, 5A_309/2013, consid. 6.3.3.

  11. Fountoulakis/Francey, Medialex 8/2020, II.2.

  12. Blick du 24.08.2020, «Entschuldigung, Jolanda Spiess-Hegglin», <https://www.blick.ch/news/ringier-ceo-marc-walder-entschuldigung-jolanda-spiess-hegglin-id16057527.html> (consulté le 18.06.2020).

  13. Linth24, 14.09.2020, Kesb-Klage geht ans Bundesgericht, <https://stgallen24.ch/articles/26703-kesb-klage-geht-ans-bundesgericht> (consulté le 18.6.2021).

  14. Cf. Conseil suisse de la presse, Directives relatives à la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste», art. 1.1.

  15. Voir Francey, La responsabilité délictuelle des fournisseurs d’hébergement et d’accès Internet, no 448 ss; Fountoulakis/Francey, La diligence d’un hébergeur sur Internet et la réparation du préjudice, Medialex 2014, p. 175 ss, p. 181 sv.

  16. Cf. ci-dessus, III.3.

  17. Cf. ATF 117 IV 270, 275; TF, 5P.40/2003 du 27.5.2003.

  18. Cf. not. BernerKomm/Brehm, ad art. 49 CO n° 110.

  19. Cf. not. Weber, Datenexport in die USA – neue Welt nach Schrems II?, EuZ 2021 p. 24 ss; Heinzke, Schrems II: Neue Anforderungen an den Transfer personenbezogener Daten in Drittländer, GRUR-Prax 2020 p. 436 ss; Schwartmann/Burkhardt, «Schrems II» als Sackgasse für die Datenwirtschaft?, Zeitschrift für Datenschutz 2021 p. 235 ss; Thieme/Wegmann, Transatlantischer Datenstillstand nach Schrems II?, BB 2020 p. 1922 ss; cf. ég. Matantu, Les implications de l’arrêt Schrems II pour les transferts internationaux de données personnelles, QFLR 2021 p. 14 ss; concernant son impact sur le droit suisse, cf. PFPDT, Communiqué de presse du 08.09.2020, https://www.edoeb.admin.ch/edoeb/fr/home/actualites/medias/medienmitteilungen.msg-id-80318.html (consulté le 18.06.2021); cf. ég. Métille, Le traitement de données personnelles sous l’angle de la (nouvelle) Loi fédérale sur la protection des données du 25 septembre 2020; SJ 2021 II p. 1 ss; Germann, Übermittlung von Personendaten im Konzern, PJA 2021 p 336 ss.

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